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INTERVIEW – BANDIT BANDIT

Voici l’interview réalisée en deux temps avec Maëva Nicolas, d’abord par téléphone puis quelques jours plus tard de visu, lors de la venue du groupe à la Poudrière de Belfort dans le cadre du Festival Génériq. La chanteuse des Bandit Bandit revient sur les influences du groupe – et notamment l’ombre gainsbourienne qui plane artistiquement au-dessus d’elle – les choix esthétiques, l’élaboration de leur premier effort, mais aussi les perspectives à venir. Un échange riche, franc et d’une rare lucidité.

 

Sensation Rock – En épluchant des interviews précédemment livrées, toutes reviennent sur votre rencontre Hugo et toi. Mais à regarder de plus près, on vous a peu, ou pas, questionné sur le nom du groupe. Y-a-t-il une référence à des films ?

Maëva Nicolas – Quand on a commencé à réfléchir au projet avec Hugo (Herleman, NDLR), avant même de parler de musique, on avait énormément d’idées en terme d’image. Que ce soit des films comme Natural born killer, Sailor et Lula, voire Pulp Fiction, avec des duos un peu farfelus, un peu mythiques, avec cet aspect déluré, « bandit » en somme. On a fait des essais avec un copain photographe et ce caractère pistolero, un brin barré, ça nous parlait pas mal. L’esthétique s’est forgée au contact des photographes avec lesquels on voulait bosser ; idem pour la musique. Et puis Bandit Bandit, tant en Français qu’en Anglais, ça fonctionne bien: le fait de répéter le mot, ça accentue cette dualité.

 

Sensation Rock – Justement évoquons d’emblée cette esthétique très particulière à travers vos visuels, tant la vidéo que la photographie. On semble face à un mélange de couleurs surannées, avec une patine, des filtres très 80’s, bandes magnétiques même, … ça donne un caractère interlope.

Maëva Nicolas – C’est carrément cela. J’ai une passion pour l’argentique, le Super 8. Oui cet effet VHS confère beaucoup de caractère et, dans les clips, on a voulu jouer avec différents formats, différentes qualités de vidéo pour donner ce côté authentique, vintage que l’on retrouve aussi dans nos chansons, dans nos textes.

 

Sensation Rock – Effectivement, et à titre d’exemple s’il en fallait un, l’usage de rideaux très colorés, brillants renvoie même à des clips plutôt estampillés “variété”, sans vouloir faire offense…

Maëva Nicolas – C’est tout à fait ça! Tu évoques le clip de Pixel: on voulait plein de couleurs, de paillettes.  On souhaitait faire référence à la variété française des années 60, très tape-à-l’œil.

 

 

Sensation Rock – Vous avez sorti votre premier EP éponyme l’an passé, précisément le 11 octobre 2019. Comment s’est déroulé l’enregistrement ?

Maëva Nicolas – L’enregistrement s’est fait en deux temps. Les deux premières chansons que l’on avait enregistrées étaient Fever et Maux. Sachant que l’on ne devait pas enregistrer cette dernière parce que l’on avait écrit ce titre deux semaines avant d’entrer en studio. Mais lorsque l’on a envoyé la démo à notre manager, il dit : “Ok, on arrête tout ! Il faut que vous bossiez à fond cette chanson car c’est celle que l’on va enregistrer et que l’on sortira en single”. C’était au mois de janvier 2019. Puis on y est retourné en juin pour mettre en boite Nyctalope, Never know et Pixel. On a enregistré avec Lionnel  Buzac. C’est avec lui que l’on souhaite encore travailler par la suite, dans un petit studio nommé Nerves, un lieu méconnu à Salon de Provence, caché derrière une boutique de tissus…. Bref, à aucun instant on ne peut penser qu’il y a un studio ici ! C’est super chouette, il y a énormément d’espace, le patron est très cool ; c’est un lieu où l’on se sent comme à la maison ! 

 

Sensation Rock – Est-ce que ce premier opus est une introspection de bout en bout de votre relation ou y a-t-il d’autres messages?

Maëva Nicolas – Ce mini-disque est constitué de chansons qui existaient depuis un bout de temps, à part Maux et Pixel, des textes qui trainaient. C’est totalement introspectif et ça nous a fait du bien quand on a lâché ces chansons. Maux parle de notre couple, Nyctalope idem, voire plus : ça parle d’Hugo, de la nuit, de faire n’importe quoi, de trainer, … Never know parle de moi, des addictions que j’ai connues et dont je me suis dépêtrée ; quant à Fever, elle évoque la passion entre nous deux. Enfin Pixel décrit notre rencontre sur Tinder. Pour moi, cet EP est vraiment cathartique.

 

Sensation Rock – A l’écoute de ces 5 titres, nombreux sont les artistes, les influences qui émergent : The Kills comme une évidence, des formations estampillées stoner, notamment pour le son des guitares très bourrines, mais également des artistes ou groupes français, anciens voire récents tels que Blind Suns – là aussi une formation fondée sur un duo amoureux – à l’écoute de Pixel, un titre avec sa pointe de surf music.

Maëva Nicolas – Personnellement, je n’ai jamais vraiment écouté The Blind Suns, même si je les ai vus à plusieurs reprises en concerts, des moments très appréciables. A contrario nous avons beaucoup écouté Grand Blanc, ça nous a vraiment inspirés. On a péché aussi du côté de François Hardy, France Gall, Gainsbourg, Bardot, les années 60.

 

Sensation Rock – Effectivement et à titre personnel, celui qui semble hanter vos titres c’est Serge Gainsbourg : le travail sur les textes, les jeux de mots, les syllabes voisines offrant des à-peu-près efficaces, c’est sa patte sans hésitation.

Maëva Nicolas – Cette comparaison fait grand plaisir: je n’ai jamais autant aimé un artiste que celui-ci! Idem pour Hugo, qui a une totale fascination pour cet homme. Je ne peux pas passer une journée sans écouter un de ses albums, il me flingue : trop de génie, une personnalité énorme, tout ce qu’il a composé pour les autres…

 

Sensation Rock – D’ailleurs, pour toi, quel est l’album de Gainsbourg qui est un incontournable? Celui que tu placerais tout au dessus ?

Maëva Nicolas – L’Histoire de Melody Nelson est assez dingo, … Initials B.B. est aussi excellent… (elle regarde dans ses playlists sur son téléphone) Ouais, mais il y a aussi Gainsbourg percussions… Je suis vraiment accro aux débuts de Gainsbourg, quand il chantait… Serge Gainsbourg N°4, ça sonne très jazz. Ouais les albums parus dans les années 60 sont parmi mes préférés: disons de ‘61 à ’71 (année de parution de L’Histoire de Melody Nelson, NDLR)… En même temps, j’adore Love on the beat… T’es chiant avec tes questions ! (rires)

 

Sensation Rock – Et un titre absolu ?

Maëva Nicolas – Initials B.B., La chanson de Prévert ou Je t’aime, … moi non plus… Je ne sais pas choisir du coup… (rires)

 

Sensation Rock – Vous êtes désormais en lien avec Cold Fame. Peux-tu revenir sur votre rapprochement ?

Maëva Nicolas – Hugo a rencontré les Last Train en 2015 si je ne m’abuse, quand il jouait encore avec son groupe d’alors, Kursed. Ils ont fait plusieurs dates ensemble, de là est née leur amitié, à travers aussi des influences communes, les mêmes délires… Quant à moi j’ai travaillé aussi chez Cold Fame en tant qu’attachée de presse et chargée de communication durant un an et demi. Puis quand s’est posée la question d’avec qui travailler pour le tour, on a eu énormément de propositions, de la plus petite boite jusqu’à de très gros tourneurs. On a décidé de prendre un peu de recul, car quand tu sors un single, un nouveau clip, un nouveau projet, les gens s’agitent beaucoup autour de rien. Parce que cela fait un peu de vues, un peu de presse… Cold Fame nous est apparu le plus juste, dans le sens où, pour cette aventure, on souhaitait travailler avec des gens qui ont la même passion et la même vision que nous de la musique. Toute l’équipe est géniale, c’est comme une famille; on se fait tous confiance. Ils ont plein d’audace, d’idées, et travaillent avec leurs tripes. On a fait le bon choix !  

 

Sensation Rock – La tournée 2019 s’est achevée en compagnie des Last Train à la Laiterie de Strasbourg (live report photographique ci-joint). Comment s’amorce la première partie de 2020?

Maëva Nicolas – Jusqu’en avril ça va être pas mal et la suite s’annonce tout aussi joli… (des dates sont égrainées pêle-mêle, NDLR)

 

Sensation Rock – Quid de votre participation au festival Génériq ce weekend?

Maëva Nicolas – Ça fait pas mal de temps que je travaille dans le monde de la musique et que j’en entends parler. C’est l’un des festivals reconnus comme découvreurs de talents et qui mettent en avant les groupes en développement, tant français qu’étrangers d’ailleurs, et c’est trop chouette : on a la chance de faire trois dates (le jeudi 06 février à L’Antonnoir, Besançon ; le lendemain à la Poudrière de Belfort et enfin samedi 08 au Consortium Museum, Dijon). On a eu des échos disant que les dates étaient, ou s’apprêtaient à être, complètes, c’est juste énorme! Et puis, partager l’affiche avec des groupes trop cools comme Squid, Otoboke Beaver et Warmduscher c’est un pur plaisir. On remercie beaucoup les programmateurs du festival de nous avoir fait confiance, on n’aurait pas pu rêver mieux !

 

Sensation Rock – Vous êtes un duo à l’origine, mais sur scène vous partagez la lumière avec deux autres partenaires de jeu. Peux-tu les présenter ?

Maëva Nicolas – Effectivement, nous sommes quatre sur scène. Quand on a pensé le projet, on avait le besoin viscéral d’entendre sonner les instruments sur scène et non pas de recourir à des machines. On a proposé à Ari Moitier, qui était le guitariste de Kursed, quelqu’un en qui Hugo a pas mal confiance. Je pense qu’ils se connaissent par cœur, qu’ils se complètent parfaitement dans la création; c’est un peu l’alchimiste des pédales. C’était donc logique qu’il rejoigne l’expérience. Et puis il y aussi Anthony Avril, c’est un peu drôle comme histoire. Hugo lui donnait des cours de guitare, il y a très très longtemps, et inversement Anthony était le coiffeur d’Hugo… Il a toujours fait de la musique en parallèle, notamment de l’electro dans Citizen Kain, comme batteur, participant à pas mal de festivals dans le monde entier. Quand on s’est revu, il nous a confié que ça le démangeait beaucoup de refaire du rock… Je suis très heureuse d’avoir avec nous ces deux mecs qui, humainement et artistiquement, collent grave au projet. On s’appréhende et on se découvre sur scène chaque soir, c’est génial d’avoir ce boys band ! Ce sont des Bandit Bandit à part entière : sans eux, le projet n’aurait pas abouti !

Bandit Bandit, le vendredi 07 février 2020, La Poudrière, Belfort

 

Sensation Rock – Y a-t-il déjà de la matière pour retourner en studio afin d’enregistrer un nouvel EP, voire un album ? Y a-t-il des dates en réflexion ?

Maëva Nicolas – Les chansons sont carrément prêtes et nous permettent d’assurer sur scène un set d’une heure. Une partie a déjà été dévoilée, notamment à La Laiterie. Côté enregistrement ça avance … On va déjà laisser vivre notre EP qui sort en physique en mars ; on va bientôt lâcher la date. On n’avait pas l’occasion jusqu’alors de le publier en vinyle ou en CD. D’ailleurs on se faisait taper sur les doigts au merch’ à chaque date (rires). On va prendre le temps de bien faire les choses, ne pas se presser, on va bosser à mort… D’ici 2021, on verra où cela en est, nous aussi… Dans un premier temps, on veut tirer un max de cet EP, qui est un joli bijou me semble-t-il, et juste kiffer la vibe !

 

-Propos recueillis et retranscrits par Benoît GILBERT

Photos : Benoît GILBERT, sauf photos promotionnelle et du EP: Jamie Noise

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