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ROCK YOUR BRAIN FEST – METAL DAY, Vendredi 20 octobre 2017, Les Tanzmatten, Sélestat (67)

Pour sa cinquième édition, le Rock Your Brain Fest, organisé par l’Association Zone 51, a mis les petits plats dans les grands. En proposant une affiche remarquable lors de deux journées à thème (la première dévolue au metal, la seconde au punk), les Tanzmatten accueillaient coup sur coup des publics distincts. Retour le vendredi, rebaptisé pour l’occasion Metal Day.

 

18h40: cette première date démarre fort avec Troldhaugen. Ultime synthèse entre le monde fluo, excentrique, donc kitchissime, des années 90 et le metal actuel, les Australiens sont la preuve vivante que l’on peut pousser très loin l’autodérision, tout en étant capable d’être carrés musicalement parlant. Tandis que ses musiciens envoient des riffs nu metal sur fond de boucles électro rigolotes et de beats hip hop, Reventüsk, le puissant chanteur, offre une prestation comique. Car soyons clairs : le fort potentiel humoristique de cette formation réside essentiellement en la personne de ce frontman corpulent, semblable à un Meatloaf version 2017, c’est-à-dire, débarrassé de ses oripeaux au profit d’un saillant sac poubelle, d’une casquette et d’une banane vert pomme. Tantôt ventriloque avec une marionnette de dinosaure bleu, tantôt adepte du handspinner, il n’a de cesse de se trémousser lascivement, de grimacer et se fait versatile dans la voix. Le rap désuet côtoie les graves pesants et les passages aigus, quasi-féminins et surjoués. Au-delà de ce décorum potache, les titres sont efficaces, à l’instar de BMX terminator, un moment jubilatoire avec son refrain entraînant. Bref, Troldhaugen ou le syncrétisme burlesque entre System of a Down et l’Eurodance, le public présent est déjà conquis.

 

Le changement de plateau est rapide et c’est désormais à Æther Realm de prendre possession de la scène. Moins loufoques que leurs compagnons de tournée européenne, les Américains assurent le spectacle avec leur death metal mélodique. Marques de fabrique oblige, les gratteux font montre d’une grande dextérité, tandis que le bassiste et chanteur propose de lourdes séances de headbanging tout en tapant puissamment du pied sur les planches. Finies donc les pitreries, l’ambiance est désormais pesante, la voix épaisse et éructée, la batterie avance pied au plancher et semble tout arracher sur son passage durant trois quarts d’heure. Dans l’assistance, on passe également le temps à hocher brutalement la tête et à s’agiter. Il y a encore de la place pour les premiers pogos aux abords de la scène. En pleine promotion de son dernier disque, Tarot, dont de nombreux titres musclés jalonnent ce concert (Tarot, Death ou encore King of cups), le groupe est explosif et ne relâche pas son effort avant l’issue du concert, qui se referme avec des applaudissements mérités. 20h30, beaucoup en profitent pour dévorer une tarte flambée et se désaltérer en extérieur. Ce soir, la météo est une dernière fois clémente pour la semaine et le public bénéficie amplement de la cour pour souffler avant la reprise des hostilités.

 

Et le mot est à peine exagéré lorsque déboule Igorrr. Pour ma part, c’est la seconde fois cette année que je croise cette créature musicale, semblable à celle du Dr Frankenstein, et le constat est le même qu’après son passage au Hellfest : c’est une claque ! Le télescopage musical servi par ce quatuor est toujours incroyable: la brutalité pure du breakcore et du batteur, la sauvagerie criée et les instants délicats, comme touchés par la grâce et invitant par exemple à une escapade balkanique, s’enchaînent parfaitement. Le maelström sonore concocté par Gautier Serre atomise le public du jour. Et même avec le vent poupe, beaucoup ce soir semblent encore des novices au contact des morceaux de choix issus de Savage Sinusoid, tels que Viande ou ieuD. Ce qui est certain, c’est qu’à l’issue du show et lorsque le duo vocal, formé par Laure Le Prunenec et Laurent Lunoir, vient se frotter au public au cours d’une instrumentale tellurique, les Tanzmatten semblent avoir tissé un lien. Au coeur d’une tournée dantesque, le « Blast barock » d’Igorrr a encore marqué les esprits !

 

 

Les vétérans de Tankard arrivent à 22h30. Ici le concert sera bien plus classique que son prédécesseur. En effet, les Allemands, emmenés par le ventripotent Andreas Geremia, sont depuis leurs débuts en 1982 des VRP du thrash metal et n’ont visiblement l’intention de changer la donne. Ainsi et dans la plus pure tradition du genre, Andreas Gutjahr, armé d’une Flying V, fait preuve de vélocité en déversant des riffs acérés comme ceux de ses confrères du Big Four. Le bedonnant chanteur multiplie les allers-retours entre la gauche et la droite de la scène afin de galvaniser l’ensemble de la foule concentrée contre les crash-barrières. Showman par excellence, il n’hésite pas à révéler son imposant ventre qu’il frappe de son micro. Les spectateurs adorent et en redemanderont durant toute l’heure.

 

Après une courte pause, je constate à mon retour dans la salle que le lieu est baigné par une odeur de sueur et de bière mêlée. Une sensation particulière mais finalement de circonstance en vue du concert d’Alestorm, littéralement Tempête de bière ! Après avoir consacré un long moment dans le hall central à dédicacer leurs albums, poser avec les fans et vendre des petits canards en plastique jaune comme goodies, les pirates viennent enfin parachever l’affiche du jour. Les titres de Queen ou de The Survivors se taisent, laissant la place au metal teinté de sonorités irish et dévoué à la grande cause du houblon. (Alestorm, Drink, …). Le dresscode est davantage chiadé qu’avec les anciens de Francfort et l’humour se loge dans les détails. Outre l’incontournable canard géant qui trône au coeur de la scène, les Ecossais ont sorti un backdrop comme dérobé sur un manège de fête foraine baptisé Poséidon. Kitsch pensez-vous ? Et que dire de Christopher Bowes ? Le chanteur muni d’un clavier en forme de guitare (simulant un accordéon) arbore un kilt rouge estampillé Alestorm, une casquette grandiose et des nu-pieds. Metal day qu’ils disaient !

Cette musique à boire boostée par des riffs massifs et des choeurs de taverne est un vrai moment de communion entre le groupe et la foule. Cette dernière s’assoit et balance les bras de gauche à droite. On se croirait en mer avec l’équipage Alestorm. Des invités grimpent à bord afin de descendre d’un trait trois bières d’affilée… L’ambiance est bon enfant et terriblement contagieuse qu’à l’autre extrémité de la salle, les membres du bar se prêtent à une petite danse, sur le zinc !

 

En quittant les Tanzmatten, un constat s’impose : cette première soirée fut une réussite. Demain, le Disorday day, jour consacré au punk, affiche complet depuis longtemps. La fête sera donc aussi au rendez-vous !

-Benoît GILBERT

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