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EUROCKEENNES 2018, jeudi 05 juillet, Belfort (90)

Premier jour de la trentième édition du festival, qui affiche sold-out malgré un contexte délicat, entre polémique sur le coût de la sécurité (et son financement), une météo capricieuse, des embouteillages monstres en début de soirée et une programmation qui demeurera toujours un sujet d’éternels débats. L’ouverture des portes permet – comme chaque année – de retrouver un site exceptionnel, boosté par de nouvelles animations et surtout des concerts pour mettre tout le monde d’accord.

 

C’est à 18h45 que les hostilités débutent réellement avec le groupe Tank & the Bangas, originaire de la Nouvelle-Orléans. Le groupe mêle jazz funky, R&B sensuelle et pop scintillante avec une décontraction rafraichissante. Malgré le stress d’être un des premiers noms d’un des plus grands festivals français, et de subir la rivalité – visuelle et sonore – de la patrouille de France, cette joyeuse bande développe un set énergique et entrainant, avec en point d’orgue une version incroyable de Smeels like Teen Spirit de Nirvana, s’assurant ainsi de nouveaux applaudissements mérités. La soirée est lancée sous de très beaux auspices.

 

La scène Radar, dans le prolongement de la Plage, permet de voir de nouveaux groupes comme Superparka – nouveau projet de Paco et Simon, anciens de We Are Match -, récemment programmé au Pitchfork Avant-garde. Un son orienté cette fois vers des influences urbaines plus synthétiques et des sonorités électro-funk, mais devant surtout faire face à une écossaise de choix.

 

En effet, Texas monte sur la grande scène : 30 ans de carrière, un des premiers groupes britanniques programmés de l’histoire des Eurockéennes, leur présence sonne comme une évidence. Sharleen Spiteri, désormais jeune quinquagénaire, demeure très populaire et d’une classe absolue dans un smoking noir impeccable agrémenté d’un tee-shirt juvénile et de baskets blanches. Si la bande fait la promotion d’un nouvel album sorti l’année dernière, elle est aussi sur scène pour ses tubes devenus des classiques : Summer Son, Halo, puis Black Eyed Boy et d’autres pour la plus grande joie d’un public multi-générationelle sautillant allégrement. Malgré la pluie, le public répond à l’invitation d’une chanteuse toujours souriante de faire la fête, Texas glisse quelques accords des White Stripes pour maintenir l’ambiance festive. Le show est assuré avec une très grande efficacité ; les paroles de I don’t want a lover semblent devoir être revues tant le lien est fort entre les musiciens et le public. L’instant est réussi, et cela malgré les trombes d’eau qui s’abattent sur la presqu’île du Malsaucy. 

Au même moment, Sampha prend possession de la Plage. L’artiste anglais ne pouvait disposer d’un plus bel écrin aux Eurocks pour livrer sa soul teintée d’électro. Lorsqu’il n’est pas derrière son clavier pour aligner ses mélodies délicates de son album Process, il rejoint ses camarades de jeu pour une battle de percussions. Seule ombre au tableau: le ciel menaçant livre ses premières gouttes. Les Eurocks en somme !

 

La pluie désormais s’est installée, et les festivaliers devront faire avec pour toute la soirée, les téméraires torses nus ou avec des sandales raffinées devenant de véritables héros ou de purs inconscients, c’est selon. La Loggia permet aux jeunes Londoniens de Dream Wife de défendre un rock aux accents punk, féministes et ouvertement engagés. « Make your own rules », clame la chanteuse Rakel, multipliant les aller-retours sur scène. Des titres comme Love ou Somebody prennent toute leur dimension en live, en dépit de la concurrence du show de Bigflo et Oli qui permet aux spectateurs d’être à l’abri de la pluie… Nul doute que nous reverrons prochainement ces jeunes Anglais talentueux, énergiques et pleins d’humour.

 

Un moment de répit avant de renoncer à la montée de la grande scène, rendue compliquée et périlleuse avec la boue ; nous optons pour Cigarettes After Sex programmés à la plage. Avec presque un quart d’heure de retard, une des révélations de l’hiver dernier monte sur scène. Certes, la musique sensuelle et romantique des Américains fait mouche, séduit les courageux présents et apporte de belles lumières à un site désormais plongé dans l’obscurité. Toutefois, les faibles échanges chanteur-groupe, voire l’idée que ce dernier est parfois absent ou terriblement concentré, laisse une impression quelque peu mitigée. Bien entendu, des morceaux comme Crush et surtout Apocalypse sont d’une incroyable beauté, mais le contexte du jeudi ne semble pas se prêter à moment aussi solennel ; difficile de faire ses premières Eurocks quand des éléments incontrôlables le demeurent.

 

Portugal. The Man est l’autre tête d’affiche rock de cette journée. Encore méconnu en France malgré déjà une abondante discographie, le groupe est néanmoins de plus en plus remarqué. De (très) bonnes guitares, une vidéographie remarquée (de Beavis et But-Head à des projections lumineuses), la maitrise est totale et le spectacle grandiose, avec des accords provisoirement empruntés à Metallica, aux Beatles ou à Pink Floyd. Le final ne pouvait se faire qu’avec le tube Feel it still, histoire de démontrer que le chapiteau est redevenu en l’espace de deux concerts un des hauts lieux des musiques actuelles de la période estivale.

La fin de soirée permet au choix d’assister au spectacle épatant du rappeur américain Macklemore, ou d’opter pour le DJ guatémaltèque Carnage, au nom prédestiné ; avec un tel éclectisme, un renouvellement des têtes d’affiche et des paris audacieux, les Eurockéennes démontrent une audace et un savoir faire qui a reçu la plus belle des récompenses : une première journée sold-out affichant 35 000 entrées. Avec la joie de savoir qu’à une heure aussi tardive, nous sommes déjà demain vendredi et prêts à attaquer une nouvelle journée…

Ambiance sous le Chapiteau Green Room

 

Julien Lagalice

-Crédits photos : Julien Lagalice (Tank & the Bangas), Éric (Cigarettes After Sex), Benoit Gilbert (Sampha, Dream Wife, Portugal. The Man, ambiance) 

 

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