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Fabulous Sheep / Social Violence

On avait quitté les Bitterois de Fabulous Sheep sur un détonnant opus éponyme avec, en morceau phare, le trépidant Peoples Around Me. Revoilà donc le quintet post-punk sur Social Violence, un second LP paru ce 25 mars.

Fabulous Sheep, ce sont cinq petits gars qui ont lié connaissance sur les bancs d’un lycée de Béziers. Une carrière qui débute véritablement en 2016 avec l’EP Kids Are Back et se poursuit en 2019 avec ce fameux album Fabulous Sheep. Le quintet est constitué de Timothée Soulairol et Piero Berini (chant et guitares), Charles Pernet (basse), Jack Pernet (batterie) et de Gabriel Decellier (sax).

Cette bande de gais pinçons se revendique volontiers formation post-punk mais tâte de tous les styles, effectuant même quelques incursions dans la new wave. Ce nouvel effort Social Violence en est la preuve éloquente avec de multiples influences qui vont des Clash aux Pixies en passant par les Strokes ou encore les Libertines. De plus, un poids lourd de la production est venu apporter ses expertise et expérience en la personne, s’il vous plaît, de Monsieur Jim Diamond qui s’est occupé des White Stripes et des Sonics, rien que ça! Les morceaux Parasite et Dogs sont l’œuvre de Diamond mais c’est déjà pas mal, Arbre E Saldana ayant géré le reste de l’album.

Le titre Social Violence parle de lui-même, le thème central de l’album étant la contestation, le ras-le-bol d’une société où tout va de mal en pis. Le mot rage ne sera jamais trop fort car le quintet, joyeux en apparence, manifeste ce courroux tant que cela lui est permis. Timothée et Piero, les deux chanteurs, ne sont pas avares en éructations et vociférations de tous genres. Rage contre les politiciens dans Parasite, contre les dérives d’Internet sur Satellite, premier single dévoilé en octobre 2021. Parasite, lui, est sorti au début de cette année.

Les morceaux composant Social Violence sont courts, frappent fort où ça fait mal mais sont intenses. La recette est ainsi similaire à l’album éponyme de 2019 avec People Around Me sur lequel, en un peu plus d’une minute, l’essentiel était dit et de la manière la plus concise qui soit. Sur ce second album donc, on prend les mêmes et on recommence : deux à trois minutes suffisent au quintet biterrois pour tout déballer. Seule Mediterranean Cemetry, l’une des deux ballades sur onze morceaux, compte cinq minutes quatorze.

Avec Fabulous Sheep, pas de retard à l’allumage ni de round d’observation, ça démarre plein pot et à fond les ballons! We Fight, qui résume fort bien le thème de l’album, entame les hostilités: se battre pour ses amis, pour les autres ou encore pour sa liberté. Pour les biterrois, tout est bon pour engager la lutte.

On embraye ensuite sur Dogs produit par Jim Diamond, puis Parasite où les politiciens de tous bords en prennent pour leur grade : démago, pourris, égocentriques. Sur Parasite, on reconnaît d’emblée l’influence Strokes, surtout par la voix du chanteur et ce morceau est tellement rock!

Avec Believe In God, Fabulous Sheep bascule dans la new wave, un petit virage à 180 degrés qui fait penser aux Clash. Dans Believe In God, on note la présence d’un saxophone, la partie de Gabriel. C’est ce qui nous fait dire que Social Violence n’est pas qu’un album de rock punk effréné mais un panel de morceaux allant dans tous les sens, un opus complet.

Mediterranean Cemetry achève de nous convaincre, magnifique ballade rappelant avec plaisir les grandes heures de Pete Doherty, en solo ou avec les Libertines. Le quintet, catalogué post-punk depuis ses débuts, montre qu’il ne s’enferme pas dans un carcan où d’aucuns se plaisent à le voir figurer. Certains n’imaginaient pas Fabulous Sheep interpréter une ballade, c’est pourtant bien la réalité avec Mediterranean Cemetery.

Satellite et Already Ready sont un poil plus rythmés mais encore loin de morceaux rock punk tels que We Fight, Dogs ou Parasite. Sur Already Ready, l’ombre des Pixies plane, précisément du dernier album en date. Already Ready a quelque chose de Long Rider : rythme lent, voix grave du chanteur. Satellite, quand à lui, est encore plus fourni musicalement, en dépit d’une cadence posée: l’autre versant, très calme, des Strokes et de Julian Casablancas. Sur Satellite, apparaissent un orgue et un piano, les deux instruments accompagnant joliment et sans trop s’imposer les guitares. Le clip de ce morceau met en image un pyjama, une référence à l’année 2020 que Fabulous Sheep qualifiait d’année pyjama car l’activité musicale était pratiquement à l’arrêt, surtout en ce qui concerne les concerts. Il faisait bon rester chez soi en pyjama.

L’ADN du quintet bitterois reste, malgré tout, rock post-punk jusqu’au bout des ongles, Timothée, Piero et leur petite clique nous gratifiant d’une nouvelle salve de morceaux accrocheurs et

sulfureux : Run, You Think Too Much ainsi que Future Is Unwritten. Par ces trois morceaux, les Fabulous Sheep apportent la preuve qu’ils sont toujours aussi saignants dans leur musique, que cette pause de trois ans n’a en rien altéré leur inspiration. La rage du quintet s’en trouve même décuplée, multipliée par cinq (voire dix). Les tristes évènements de 2020, loin d’avoir sapé le moral de ces petits gars bourrés de talents, ont contribué à renforcer leur volonté de créer toujours plus. Social Violence est le résultat de tout ce travail, de loin le disque le plus abouti des bitterois. Toutes les grandes influences internationales sont réunies sur un seul album et qui plus est par le biais d’un groupe bien de chez nous, une bande de cinq petits franchouillards qui ne craignent ni Dieu ni personne.

Social Violence se termine sur une autre ballade intitulée Keep On Dancing qui, hélas, connaît une fin trop brutale. Cette somptueuse compo aurait gagné à durer plus longtemps avec une fin un peu plus soignée, ce qui pourtant n’enlève rien à l’interprétation de Fabulous Sheep. Le rythme est planant, les guitares agréables à l’écoute mais la voix hurlante du chanteur donne à Keep On Dancing sa véritable coloration rock punk. Une ballade certes mais qui, mine de rien, déménage beau faire! Quand on dit que les apparences sont parfois trompeuses, le quintet de Béziers ne se prive pas d’en apporter l’exemple.

Les meilleurs opus arrivent souvent sans faire de bruit, sans un gros tapage médiatique. Social Violence fait partie de cette catégorie, quasiment ignoré par la France du rock mais, heureusement, certaines voix sont là pour rattraper le coup car Fabulous Sheep mérite toute notre reconnaissance. Timothée, Charles, Piero, Jack et Gabriel se sont véritablement surpassés pour nous offrir le meilleur, un travail de longue haleine duquel, au risque de se répéter, résulte un album complet, se baladant du post-punk à la new wave, allant même jusqu’à nous pondre une superbe chanson comme Mediterranean Cemetery.

Béziers n’est pas seulement la ville du rugby, c’est aussi et surtout la celle d’un groupe de caractère qui ne s’impose aucune barrière de langage. Qui écoute Social Violence une première fois l’adoptera inévitablement. Avec Fabulous Sheep et ce génial second opus, le rock français a trouvé sa voix!

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