Fauve Corp/2015
Les revoilà donc. Le collectif qui aura fait couler le plus d’encre et de salive lors de leur fulgurante arrivée en 2010 continue son exploration cathartique des “blizzards” – terme sous lequel se regroupent angoisses et démons.
Suite et fin de l’album sorti l’an passé, Vieux Frères – Partie 2 est toujours autant incandescent – ou horripilant, c’est selon. Ce qui est difficile avec Fauve, c’est que chacune de ses qualités peut être retournée en défaut. Fauve est le vêtement réversible des tourments et questionnements sans réponse. Libérateur ou réducteur, soulageant ou emprisonnant. Ceux qu’on catégorisaient comme “générationnels” et “porte-paroles” sont le symptôme d’un public qui recherche avant tout l’identification, laquelle passe par la recette des rythmes marqués, des envolées lyriques et des textes percutants. Pourtant, on saluera la modestie (tout en ne pouvant s’empêcher de penser qu’elle est probablement feinte) : “nos textes sont quasiment toujours écrits dans l’optique d’en faire des chansons, ils n’ont pas vocation à exister par eux-mêmes” (non, chers fans des réseaux sociaux, Fauve ce n’est pas de la littérature, ce qui ne signifie pas pour autant que c’est mauvais, ne soyons pas snob). Le projet était innovant (d’un genre presque indéfinissable, héritier de Michel Cloup) ; il est seulement devenu ce que l’hystérie du public en a fait. D’où peut être cette délocalisation hors murs (Azulejos et Les Hautes Lumières font référence à Lisbonne, ville des échappées solitaires et solaires). Ouverture sur Juillet (1998), des beats, des riffs. La posture de l’observateur à la première personne, celui qui “flotte au-dessus du sol” est conservée, ainsi que l’apostrophe en “tu” qui exaspère ou identifie. Vertige du temps et des prises de conscience. Une inclinaison plus “rock” et moins hip-hop se dégage des compositions – sauf Bermudes, dont on appréciera la violence. Azulejos est intéressant car il délaisse une forme de complaisance dans le redoublement de ces maux par les mots pour la description d’une déchéance corporelle, dénuée d’accompagnement musical. Fauve, dans le morceau final Les Hautes Lumières, parle d’un “avant”, “comme avant, quand on était adolescent”. Fauve fait du fauve, mais il le fait bien, reconnaissons-lui cela. Reste à attendre, l’après.
Artiste : Fauve
Album : Vieux Frères – Partie 2
Label/distribution : Fauve Corp
Date de sortie : 16 février 2015
Genre : fauvesque
Catégorie : Album rock
