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LES EUROCKEENNES DE BELFORT, Samedi 5 Juillet 2014 (par Caroline Dreux)

1ere surprise de cette fin d’après-midi du samedi 5 juillet à Belfort : Il ne pleut plus ! Le soleil semble même décidé à ne pas tolérer la persistance des quelques nébulosités restantes. Il n’empêche qu’on ressemble tous à des fermiers en arrivant sur le site : vêtements crottés de boue, bottes passées par-dessus les bas de pantalon de rechange avec l’illusoire espoir qu’il restera immaculé (naïfs que nous sommes !) et chapeaux de paille sont de sortie. La presqu’île de Malsaucy s’est transformée en patinoire de boue sur laquelle naviguent (et vu le caractère liquide de la matière, le mot est encore faible) plus ou moins heureusement les festivaliers qui ne se sont pas encore tous remis de la veille.

Moi-même, j’ai eu le démarrage difficile, il faut bien l’avouer, et je n’arrive à la scène de la Loggia que pour le dernier quart d’heure de la prestation de Pégase. Ah !! J’enrage de ne pas avoir été plus réactive ! Il y a déjà une joie communicative qui émane de cette scène au fur et à mesure que je m’en approche. Jeunes talents SFR , Raphaël d’Hervez et sa formation jouent crânement leur chance et ne se laissent pas impressionner par un parterre déjà nombreux (du moins tentent-ils la désinvolture). Pop lyrique à mi-chemin entre Arcade Fire, Coldplay et MGMT, les arrangements laissent la part belle à un synthé symphonique sur un rythme d’infanterie. Les blancs bien calculés suivis d’un déchaînement orchestral entraînent le public à les accompagner en sautant dans la boue (ou plutôt le mélange de terre, bière et vomi qu’on ose encore appeler boue), ce qui n’est d’ailleurs pas franchement une très très bonne idée ! La qualité mélodique, la voix envoûtante et haut perchée de Raphaël d’Hervez constituent une entrée en matière tout à fait réjouissante pour une soirée qui s’annonce particulièrement belle.

Direction le Green Room où commence déjà le concert de Jagwar Ma. Venu de loin, le duo australien propose une électro rock tout à fait décomplexée où sur la même scène vous retrouvez tour à tour des références aussi variées que Fatboyslim ou The Beatles. Difficile dès lors de qualifier le style de cette formation inclassable, on passe aussi aisément du rock à l’électro en passant par du psyché aussi bien que du garage. D’ailleurs, il est à noter que leur look est tout à fait aussi indéfini que leur musique. Doit-on mettre cet éclectisme sur le compte de la culture australienne elle-même fruit de nombreux métissages? Se mesurer aux références musicales majeures de ces 50 dernières années ne semble en tous cas pas un problème pour les Jagwar Ma. Ils entraînent avec eux les eurockéens et eurockéennes dans une danse solaire (oui oui ! il fait beau !) qui bizarrement évoque plutôt la vie nocturne (est-ce parce qu’il fait nuit là-bas à Sydney ?). Je me laisse séduire par le culot et l’audace de ce groupe des antipodes et me voilà à sauter vers le soleil sur le sol détrempé.

Après une mousse fraîche bien méritée, retour à la Loggia (et oui, aujourd’hui, je n’irai pas à la plage, dédiée à l’électro sous la houlette du DJ et producteur Brodinski). Circa Waves se place en droite lignée de l’héritage prolifique des Libertines. D’ailleurs, devinez quoi ? Le quatuor vient de Liverpool, véritable usine de Brit Pop depuis près d’un demi-siècle ! Alors oui, c’est vrai, ce n’est pas très nouveau après des groupes comme The Klaxons, The Arctic Monkeys, The Kooks ou encore The Rascals pour ne citer qu’eux et la voix du leader rappelle étrangement celle d’un Alex Turner ou d’un Miles Kane mais c’est percutant, rafraîchissant, joyeux, jouissif, en un mot rock. D’ailleurs, les toutes petites 45 minutes de set qui leur sont allouées passent aussi rapidement que les formats courts de leurs morceaux qui sont tous de petits tubes en puissance et qui ne demandent qu’à s’épanouir.

Circa Waves constitue une excellente première partie à l’une des têtes d’affiche du festival attendue désormais sur la grande scène des Eurockéennes 10 ans après leur première venue à Belfort : Franz Ferdinand. Le groupe est connu pour ses performances scéniques (à certaines desquelles j’ai déjà eu la chance d’assister). Au milieu du parterre, il y a de l’électricité dans l’air du crépuscule (et pourtant aucun orage à l’horizon, ouf !), une certaine excitation me gagne alors que derrière moi, de joyeux lurons chantent à tue-tête en brandissant des verres de bière qui menacent de faire pleuvoir une averse toute spéciale. « Matinee » débute le programme de ce concert sous des vivats déjà nourris. Les 75 minutes suivantes sont tout simplement ébouriffantes. Les quelques problèmes sonores du début se résolvent assez vite et la pop-rock des écossais prend alors son envol. Les titres s’enchaînent plus ou moins bien connus du public présent, issus des 4 albums du groupe. Peu importe, fans incorruptibles ou novices, on est emportés par l’énergie de Alex Paul Kapranos et Nick McCarthy. Rythmes scandés par des milliers de mains tendues, refrains repris en chœur, ils arrivent à vous donner l’impression que vous connaissez tous leurs titres depuis toujours. « Take me out » continue de constituer l’acmé d’un set bouillant et remuant. Les Franz Ferdinand confirment leur statut de bêtes de scène jusqu’ici non démenti. On en redemande !

Galvanisée par ce moment d’énergie pure, je me rends sur le Greenroom où sévit l’électroswing autrichien de Parov Stelar Band. A la nuit tombée, me voilà au milieu d’une joyeuse assemblée. Autour de la scène, ça valse, ça tourne, ça rit, ça chante. Sur le parterre, ça saute, ça crie, ça se remue. Je me laisse séduire par le décor. DJ et batterie sont installés sur des podiums qui ne sont autres que des écrans géants donnant l’impression que les membres du groupe font partie intégrante de l’image projetée simultanément sur l’écran géant du fond de scène. Avec eux, voix, trompettiste et saxophoniste pour le côté swing. A la façon de Caravan Palace il y a quelques années, les cuivres rétro s’associent aux beats électro régulièrement interrompus avec des moments plus calmes. Cependant Parov Stelar Band reste, à mon sens, un concert d’ambiance. Les morceaux s’enchaînent tous semblables les uns aux autres sans aucune variation de tempo. La même chanson pourrait être jouée durant l’intégralité du concert sans que cela soit franchement perceptible. Cette prestation ne restera probablement pas dans les annales musicales mais je suppose qu’elle laissera un souvenir marquant dans le cœur des festivaliers qui s’y sont défoulés.

Enfin, je termine une soirée passée à la vitesse de l’éclair (non, non, toujours pas d’orage pourtant) avec le duo anglais émergeant de Drenge. Après la performance de Shaka Ponk sur la grande scène, les anglais attaquent sans temps mort avec leur titre «Face like a skull » comme un appel et un clin d’œil aux festivaliers déjà un peu attaqués en cette fin de 2ème soirée. Le rock définitivement situé entre garage et grunge est puissant. La voix grave de Eoin Loveless amène une certaine dose de lyrisme tandis que son frère Rory s’échine sur une batterie pailletée qui semble impassible sous l’énergie déferlante du jeune homme. L’ensemble transpire une mélancolie un peu nihiliste qui n’est pas sans intérêt. Il manquait juste peut-être un peu d’investissement auprès du public pour que cette prestation conclue parfaitement une soirée déjà particulièrement riche en découvertes et redécouvertes.

A suivre…

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