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Interview : SLIFT au Festival Levitation

A l’occasion d’une superbe date calée pour la version française du festival Levitation au Chabada d’Angers, on a eu la chance de se poser avec les toulousains de SLIFT pour leur poser quelques questions avant un concert encore une fois monumental.
La tout fraîche légende angevine raconte que même Thomas Pesquet aurait entendu le concert depuis la station internationale…

Le trio toulousains qu’on entend crier dans l’espace

Salut Jean (Guitariste), salut Rémi (Basisste), comment ça va ? Vous revenez tout juste de Lyon ou vous avez joué à la Messe de Minuit, première fois sur Lyon ?

Rémi : C’est la première fois que nous jouons là bas, on avait joué il y a très longtemps dans un bar pour notre première “vraie” fois à Lyon.

SLIFT c’est un power-trio heavy-psych composé avec Canek (batteur) que vous connaissez depuis l’époque du lycée et avec qui vous jouez depuis “toujours”. On a retrouvé quelques pépites perdues de votre parcours dans les abysses de l’ancien internet, Myspace avec notamment… “U.R.S.S” d’inspiration très “Cobra”, bien Punk avec votre ancien groupe les Play Mobiles, ça vous parle ?

Rémi et Jean : “Rires” Ouai, ouai bien sûr…

Mais il y a surtout dans le lot une piste intitulée “El Paso” qui définit finalement assez bien l’évolution de votre trio, c’est vraiment l’une des phases pré-SLIFT la plus importante ?

Jean : Exactement ! C’est exactement ce morceau, c’est le dernier qu’on a fait avant de virer sur SLIFT .

Rémi : Oui. Après nous en avons fait trois autres qui ne sont jamais sortis juste avant SLIFT.

Jean : Ce que je veux dire c’est que c’est effectivement ce morceau qui a été la clé de voûte pour la suite. Effectivement, c’est marrant que tu l’ai remarqué.

Vous aviez aussi sorti un EP plus compliqué à trouver aussi chez Decharge Record si je ne dis pas de bêtise au tout début du nom SLIFT.  Avant “Space Is The Key” paru chez…

Jean : Oui, chez Howlin Banana. En effet on a fait à l’époque une maquette que nous avions sorti nous-même. Et après nous avons effectivement fait un EP chez eux.

Parce que celui-ci je vous avoue ne pas avoir réussi à mettre la main dessus, il est bien planqué des les archives…

Jean : “Rires” Ah Oui ! Il y en a un qui est quasi introuvable maintenant…

L’EP avec un artwork représentant une tête de lion en noir et blanc ?

Guthio (Visual Artist pour le groupe) : Ah ! Mais ça c’est celui de 2016 “Space Trip Is For Everyone”. Il a été réédité d’ailleurs mais c’est la même chose. Il a juste été remastérisé.

Pour revenir sur El Paso et cette période “virage” pour vous, c’est l’une des tracks les plus longues de l’époque ?

Jean : Oui carrément, c’était rare qu’on dépasse les 5 minutes par morceau.

On retrouve évidemment dans le titre, mais surtout dans la guitare Lead un son très “Billy Gibbonien”, une ambiance Desert Rock mais aussi et surtout une intro très orientée prog’ à la King Crimson suivie de relans Punk qui sont vos premiers amours de jeunesse. Ce virage, il est survenu en même temps que ce fameux concert révélation de Moon Duo à Toulouse ?

Jean : Oui c’était un peu au même moment, c’est vraiment à partir de ce concert que l’on s’est dit ensemble que l’on avait envie de partir ensemble vers la création de musiques plus longues, à créer des choses plus répétitives, plus soniques. Une envie d’aller plus loin que le couplet-refrain classique que l’on faisait lors de nos débuts Punk-Rock avec des morceaux de deux minutes à fond.

Mais cette influence n’est pas pour autant perdue puisqu’on la retrouve encore sur “Space Is The Key” et certaines des tracks plus courtes. Et même dans l’enregistrement qui s’est fait de manière assez précipité, presque en mode jam à l’inverse d’UMMON.

Jean : C’est ce qui s’est effectivement passé pour le premier disque.

Période confinement : Hyperion > Hyper-marché

UMMON est sorti officiellement dans les bacs il y a un an et demi, comment vous avez digéré de votre côté depuis votre dernier-né, alors on imagine bien la frustration que ça peut avoir de sortir un disque juste avant la période COVID, pas forcément côté scène mais par rapport au côté retours public et critiques ?

Jean : C’est vraiment cool. Au final, on a eu de la chance de passer à travers le COVID, du moins on a eu cette chance que l’album prenne. Ce qui en soit nous a aussi permis de passer en tant que groupe cette épreuve. Peut-être que si l’album n’avait pas du tout pris, on se serait posé des questions. Mais on est vraiment très satisfait des différents retours et surtout très content de pouvoir à nouveau le rejouer sur scène.

Avec la Levitation Session on voulait un peu se venger de ne pas avoir pu assez le jouer. Du coup, on a proposé un Live en vidéo pour que tout le monde puisse en profiter. Là, on est vraiment content que ça reparte et mine de rien cet album a été assez “gamechanger” pour nous. On ne jouait pas, on était chez nous derrière notre écran comme beaucoup et c’est un peu… la magie d’internet qui à fait le reste !

Il y a les lives captés mais avant la vidéo, c’était aussi une image qui a capté l’attention. Cet artwork magnifique de Caza  qui était déjà à la sortie du disque une première invitation au récit stellaire et au voyage d’Hypérion.

L’image, la cinématographie semble être quelque chose de très important pour vous. Avant cette superbe captation pour Levitation , c’est aussi et surtout la Live Session pour la radio KEXP avec son million de vues sur Youtube qui vous a permis d’avoir une reconnaissance et une exposition plus internationale notamment en Amérique du Nord. Vous avez conscience du poids des médias de ce type dans cette ascension, c’est quelque chose que vous avez envie de reproduire à nouveau par la suite ? Les concerts “non-physiques” ?

Jean : Oui, c’est intéressant et puis de manière générale tout le monde va tendre vers ça, des retransmissions type Live Session, on va voir ce qu’on nous propose aussi.

Rémi : A l’heure d’internet, c’est un outil de communication utilisé par tous les groupes. Quand tu veux écouter un groupe, tu vas sur Youtube et tu espères trouver une belle vidéo pour te rendre compte de ce que va donner un groupe en concert. Comment sont les mecs sur scène, comment ça joue…

Jean : Et effectivement, KEXP c’est une grosse porte d’entrée, nous-même avons découvert mille groupes là dessus, dès qu’on a commencé a joué nous avons poncé les sessions disponibles.

C’est sûr que c’est un outil énorme pour avoir de la visibilité, permettre de jouer de la musique et que les gens regarde ce que tu fais.

C’est aussi des “médias” de confiance qui mettent particulièrement bien en valeur les groupes via la production, le mix.

Jean : Oui, ça y joue beaucoup, ils sont hyper pro’ !

Quand vous êtes sorti après toutes ces sessions du studio d’Olivier Cussac (le Condorcet à Toulouse)  avec cette double galette noire, qu’est-ce que vous attendiez ? Vous aviez des craintes ? De la fierté j’imagine avant tout ?

Jean : On est sorti content, vraiment content parce que l’on a fait exactement ce que l’on voulait sur un mois, on a pris vraiment le temps. Zéro regret quoi qu’il arrive, on a fait ce que l’on voulait faire.

Après des craintes… c’est peut-être plutôt vis-à-vis du label car ça a aussi un prix de faire ça et on nous a donné “carte blanche”. Jamais je n’aurai pu penser que quelqu’un nous file “carte blanche” sur un projet comme ça en mode “Go, allez faîtes votre truc”.

Donc on s’est dit bon… J’espère qu’ils vont en vendre un peu, au moins pour rentrer dans leurs frais “rires” !  Après ce sont des trucs de labels, mais sur la partie artistique du moment ou l’on a fait ce qu’on voulait faire, nous n’avions pas à avoir de regret sur quoique ce soit.

Succès en Perfide Albion

Effectivement, vous êtes passés de 3 jours d’enregistrement à 30 jours, en termes de coût et de gestion derrière c’est pas la même chose mais vous accouchez d’un gros double album donc on en a pour son argent tout de même ! “Rires”

Vous étiez aussi au début du mois de septembre de retour en Angleterre pour quelques dates, notamment du côté de Bristol chez Alex Studer ?

Rémi : Oui du label Stolen Body Records.

Personnellement, je vous ai justement connu via son label que j’ai découvert par hasard et qui éditait des disques de psyché et des bootlegs des King Gizzard’…A l’instar des Liminanas qui sont venu jouer en tête d’affiche d’hier au festival, vous êtes un groupe de la scène psyché qui a aussi pu bénéficier d’un coup de pouce au démarrage grâce à des labels étrangers et tourneurs étrangers qui ont cru en vous ?

Jean : Oui, nous on l’a fait très vite et je pense qu’il ne faut pas hésiter à aller jouer à l’étranger car il y a des choses vraiment chouettes partout, d’autant qu’au UK ils ont peut-être… Et c’est même sûr d’ailleurs ! Ils ont une culture du Rock qui est sûrement plus encrée en tous cas dans les mœurs. Les mecs sont rodés, ils ont plein de labels, plein de clubs, plein de groupes… Ça brasse et c’est cool d’être du sud de la France et puis d’aller là-bas et discuter avec des gens qui vivent ailleurs et y faire des concerts. Chose que les groupes français devraient faire plus souvent, même si plein de groupes le font déjà. Mais ça va aller en grandissant…

Vous étiez aussi chez Hiwatt pour l’occasion (marque historique anglaise d’amplificateur guitares et basses ) au passage, ils vous ont proposé un sponsoring ?

Remy : Oui ! Ils nous ont prêté du matos sur la tournée, notamment pour moi avec un ampli basse et guitare que j’utilise pour mettre la Fuzz. On était là bas et je suis tombé amoureux du son donc on est rentré avec du matériel. J’ai une moitié ici et la seconde moitié qui ne va pas tarder à arriver… On croise les doigts pour le Desert Fest‘ (Anvers).

Un Rig de Daguet et d’épée

Côté son et instruments tous les deux très “Fender” avant SLIFT, vous jouez désormais sur deux modèles SG de chez Daguet (luthier toulousain), c’est une création spécifique que vous avez fait pour le groupe ?

Jean et Rémi : Oui, complétement c’était au tout début du groupe que ça s’est fait.

Jean, l’une de tes influences les plus citées est Jimy Hendrix, cette influence ce ressent beaucoup sur scène notamment au niveau de ton rapport avec la wah et l’utilisation de celle-ci. Constamment en équilibre dessus, presque un instrument à part ?

Jean : Oui, c’est une Real McCoy RMC-1. Elle n’est pas tout le temps enclenchée mais oui beaucoup…C’est vraiment l’une des deux pédales avec la Fuzz (Fuzz Warr de Death By Audio) dont je ne pourrais vraiment pas me passer, voir le délai aussi (DM-2W Waza de chez Boss). Ces trois là sont là base du son SLIFT.

Rémi, je crois que toi aussi tu as une Fuzz Warr c’est bien ça et une pédale Ampeg ?

Rémi : Oui mais pas de wah. Moi pour le moment, j’ai juste la Fuzz et une AB/Y qui me permets de passer entre l’ampli basse et l’ampli Fuzz à la place de mettre la Fuzz sur l’ampli basse. J’ai rajouté un nouvel ampli pour que ça marche bien.

Jean : Quand tu mets une pédale de Fuzz sur un ampli basse, tu vas perdre du bas et en définition.  Il existe des pédales avec un Dry/Wet mais bon…

Rémi : Ça reste quand même une mauvaise idée ! (rires)

On parle aussi beaucoup de cette mystérieuse pédale Enzo de chez Meris qui fait… plein de choses !

Jean : Elle fait beaucoup de choses mais je ne dois m’en servir qu’à 0,1% de ses possibilités. C’est un genre de synthétiseur usine à gaz. Je m’en sers uniquement pour quelques sons, en octaver aussi. Je m’en sers plus avec parcimonie, mais mine de rien il y a des petits moments dans le set ou c’est devenu une pièce maîtresse dont je ne pourrais plus m’en passer.

Ils vous arrivent encore de tenter des choses avant ou pendant le show, voir modifier le chaînage des pédales ?

Jean : Alors, changer des pédales ça je ne le fais pas trop, par contre tenter des trucs… (rires). Ils sont témoins, des fois c’est bien mais derrière ils peuvent aussi parfois me dire aussi “gros t’as fait un truc… c’était pas top”. C’est selon les soirs.

Jean, tu joues aussi sur une DreadBox (Synthé) sur scène. C’est un instrument que tu as appris à dompter dessus spécialement pour le groupe ?

Jean : Oui exactement. Les synthé’ m’ont toujours intrigué, mais je n’avais pas sauté le pas jusqu’à m’en prendre un. Là, avec SLIFT, j’aimais bien l’idée d’en mettre dans notre disque.

 

2022 : La zone du dehors ?

Évoquons l’avenir avec un autre pays anglophone, fin de cette année il y avait une tournée de caler avec les américains de All Them Wytches qui a malheureusement du être annulée.  Ce sont eux qui vous ont contacté initialement ?

Remy : Totalement, c’est le guitariste Ben Mcleod qui nous a contacté directement sur Instagram.

Classe !

Jean : Ah ça nous a fait plaisir, on le suit depuis longtemps !

Guthio : Il tient un Podcast d’ailleurs ou il passe des morceaux d’UMMON et il a regardé la Levitation Session. C’est cool car il aime beaucoup le groupe !

Vous avez réussi à recaler quelque chose niveau dates avec eux pour l’année 2022 ? Une tournée Nord-Américaine aussi éventuellement dans les clous ?

Jean : Pour la tournée Nord-Américaine, oui. Ça c’est trop bien mais nous n’allons pas reporter la tournée européenne que l’on avait prévu avec All Them Wytches malheureusement. Mais ce n’est qu’une question de temps que l’on ouvre pour eux aux Etats-Unis ou en Europe… ce serait énorme en tout cas et j’espère vraiment que ça se fera.

On croise les doigts pour vous. Vous avez pu heureusement faire pas mal de concerts cet été sur août et septembre. Avant ça, on a vécu une période assez creuse côté l’activité scénique.

Pour toutes les bonnes recettes, il faut des bons ingrédients mais surtout du temps. Vous avez pris ce temps pour réussir UMMON. Les mois de confinement ont obliger beaucoup de musiciens à se poser bien malgré eux. Ce temps là, il a été prolifique pour vous ou à l’inverse, vu l’avez vécu comme certains, comme une sorte de temps mort sans l’inspiration de la rencontre scénique, de tournée ?

Jean : Il y a un peu de ça, en plus au début du confinement ça a été compliqué. Nous n’étions pas tous au même endroit et répéter c’était vraiment chaud. Là, on travaille sur le prochain disque, et on y a travaillé sur toute la période Covid. Mais effectivement, les morceaux présents sur UMMON nous les avions joué pour la plupart un an avant de les enregistrer et du coup, ils ont eu différentes moutures et ont continué d’évoluer à chaque concert. On aime bien faire çà et là forcément  durant cette période, nous n’avons pas pu le faire. On a eu pas mal d’idées qu’il faut vraiment que l’on continue de travailler chez nous mais effectivement, on a besoin de tourner et jouer les morceaux en live avant de les enregistrer pour qu’ils prennent “forme finale”.

Cela se ressent dans vos shows.  Vous l’évoquez souvent qu’entre vos lives, il y a des phrases, des passages que vous changez sur les pistes. Parfois simplement de l’improvisation par moment, la vie “continue” sur scène ?

Jean : Exactement, c’est le cas.

Côté Setlist, vous jouez en enchaînant les tracks du premier LP d’UMMON dans l’ordre avec en climax-outro “Lions, Tigers and Bears” que vous faîtes tourner et qui sont les pistes “logiques” et très Pogo-Friendly. Il y a deux trois pistes plus “cinématographiques” et “poétiques” que j’adore particulièrement dont “Sonar” et le superbe “Aurore aux Confins”. Ce sont des tracks qui vous intéresserez de jouer sur un set plus long ?

Jean : C’est l’idée, on aimerait carrément les jouer…

Guthio : Sonar a été joué quelques fois déjà il me semble.

Jean : Oui effectivement sur des sets d’une heure voir plus, mais on doit faire des choix sur scène. on prévoit de faire quelque chose pour 2022 à ce sujet et de jouer l’album en entier…

Pouvez-vous nous en dire éventuellement plus sur le successeur d’UMMON ? C’est en cours de préparation ? Une suite directe ?

Jean : On va dire que ce sera dans la continuité. Il est  en préparation donc pleins de choses sont en train de mijoter…

Merci à Slift, Hélène, Guthio et Lara ainsi qu’aux équipes du festival et du Chabada pour l’accueil et l’ITW.
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