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INTERVIEW : THE AMAZONS

Le 22 novembre dernier, les anglais de The Amazons investissait la capitale pour un concert au Point Ephémère où ils ne manqueraient pas de fêter l’anniversaire de leur chanteur, Matt. Quelques heures avant son passage sur scène, celui-ci s’est prêté au jeu de l’interview accompagné de Chris, le guitariste du groupe.  

Vous vous êtes formés en 2014 seulement, et très vite c’est le succès en Angleterre. Comment tout cela est-il arrivé à votre avis ?

Matt : Pour nous, ça ne parait pas si rapide. On a commencé il y a 3 ans en Angleterre, et on a vécu chaque seconde de ces trois années. Pour quelqu’un qui nous découvre seulement cette année, ça peut paraître rapide. Mais nous, on a vu toutes les étapes de notre progression. On a passé des années à jouer dans des salles vides, sans connaître le succès. Mais c’est vrai que lorsqu’on a annoncé notre album en début d’année, ça s’est vraiment accéléré. 2017 a vraiment été la meilleure année pour nous. C’est l’année qui a tout changé.

Pour votre album sorti en juin dernier, vous avez signé chez Fiction Records et travaillé avec la productrice de Foals. Est-ce un groupe qui vous inspire beaucoup ou est-ce le travail de la productrice Catherine Marks qui vous intéressait ? 

Matt : C’était définitivement pour Catherine Marks qu’on a choisi Fiction Records. On avait écouté son travail avec Wolf Alice, avec Foals… On avait vraiment envie de travailler avec elle. D’ailleurs on a fait plusieurs singles avec elle avant l’album. C’est pour cette raison que ça a vraiment bien marché, parce qu’on a construit une relation sur le long terme plutôt que de se découvrir au tout début de l’album. On avait déjà enregistré des titres ensemble avant l’album, donc on se connaissait bien. Et puis, oui, bien sûr Fiction a de supers groupes, une très belle histoire, alors on était plus qu’heureux de travailler avec eux pour cet album.

Parmi vos influences, on parle beaucoup de Nirvana, Foo Fighters, Queens of the Stone Age, Arctic Monkeys, Red hot Chili Peppers, Rage against the machine. Que des groupes américains finalement, sauf Arctic Monkeys. Vous n’aimez pas trop la scène britannique ? 

Matt : Si… je pense que les meilleurs groupes sont britanniques. Que ce soit les Beatles, Pink Floyd…

Chris : Led Zeppelin, the Clash…

Matt : Oui exactement. Et aussi The Smith, Bowie, Queen… Ce sont les meilleurs ! Mais quand on fait de la musique, surtout quand on vient d’une ville comme Reading, on s’intéresse toujours à ce qui existe en dehors de Reading. On cherche à s’en échapper. Alors les groupes que vous avez cités nous paraissent toujours plus excitants. Comme Nirvana qui vient de Seattle. À quoi ressemble Seattle ? Ça doit être incroyable ! Il y a cette notion de distance qui nous attire. Et la manière dont sonnent ces groupes, ça correspond à notre musique. Et puis vous savez, il y a cette vieille tradition de groupe anglais qui écoutent des groupes américains comme les Beatles, Led Zeppelin, Pink Floyd… Ils n’écoutaient pas de la musique britannique. Ils écoutaient de la musique américaine. Alors ce n’est pas vraiment différent pour nous. Et de leur côté, les américains écoutent de la musique anglaise. C’est ça aussi le rock’n’roll, c’est un échange d’idées. Et c’est aussi être influencés par d’autres groupes.

 

 

Vous avez sorti beaucoup d’EPs avant de sortir votre album, c’était voulu ou vous n’étiez pas encore prêts pour entière production ?

Matt : Il y a tout un process pour construire un album et pour se faire connaître. On fait des singles, on part en tournée, on sort des EP. Tout ça fait partie du mécanisme pour se faire connaître, et pour que les gens achètent notre album. Parce que si personne n’achète notre album, c’est foutu ! Voilà ce que c’était. Nous ça importe peu la manière dont est publiée notre musique, on se contente d’enregistrer des chansons. Ça ne change rien si c’est un EP ou un album. Finalement c’est plutôt une question d’argent. Ce qui est le cas pour une grande partie de ce qu’on fait. Les gens diront que la musique ce n’est pas du business mais si on veut vivre de la musique, c’est forcément une question d’argent. C’est pour ça que c’est plutôt une décision orientée afin de d’abord capter un public, se faire connaître puis sortir un album.

Sur certains titres comme In My Mind, les arrangements au clavier sont très présents dans l’album, alors que sur scène il n’y a pas ces claviers. C’était compliqué d’avoir un 5ème membre au sein de la formation ? Ou c’est autre chose ?

Matt et Chris : Oui, ça coûte trop cher ! (rire)

Matt : Oui c’est trop cher d’engager quelqu’un pour jouer au clavier. En fait, là où on a enregistré notre album, le studio « Assault & Battery », il y avait énormément de claviers et de synthés. Par exemple il y avait ce synthétiseur qu’on peut entendre sur « Black Magic ». On visitait l’exposition Pink Floyd…

Chris : Et là on a vu quasiment le même synthétiseur à travers une vitrine. C’était pas tout à fait le même mais c’était le modèle d’il y a 40 ans.

Matt : Oui et on a eu cette réflexion à propos de ce qui est ancien et de ce qui est neuf. Et on a voulu utiliser un peu d’ « ancien ». C’était plus intéressant à écouter. Mais quand les gens nous voient sur scène c’est plus une question d’énergie, de passion. Alors le clavier a moins son importance. Mais au contraire, quand les gens écoutent l’album encore et encore, il y a besoin de profondeur. Il faut que les gens découvrent de nouvelles choses à chaque écoute. Pour cette raison, le clavier nous paraissait intéressant. Mais en concert, tout est une question d’énergie.

Apparemment vous avez tous de très bonnes guitares et de bons amplis qui sonnent très bien, accordez-vous une attention particulière à votre matériel ? Vous avez peut-être une anecdote sur l’achat de vos guitares ou leur provenance ?

Chris : Nos guitares, vraiment ? (rire)

Matt :  Vous aimez nos guitares ? J’ai emprunté mes guitares à Gibson. Il y a un siège de Gibson à Londres alors j’y suis allé et j’ai demandé « Est-ce que je peux avoir des guitares ? ». Je n’aurai jamais eu le moyen de les acheter sinon. Mais il faut que j’y fasse vraiment très attention ! Je ne les casse jamais, je les pose tout doucement. C’est pas très rock’n’roll ! (rire) Mais toi Chris, t’as combien de guitares déjà ?

Chris : J’en ai 12. Mais certaines sont pourries. Ma préférée est une Duisenberg Caribou, c’est une entreprise allemande. Et j’ai vu un gars qui s’appelait… Kieran McCallahan. Il jouait avec Kevin Parker, Mark Ronson et Andy Wyatt. Ils interprétaient une reprise pour Triple J, une radio australienne. Je les ai vu jouer et c’était vraiment cool. Et je me suis dit je veux cette guitare !

Hier, nos collègues de Sensation Rock vous ont vu à Lausanne, et l’ordre des chansons joué est surprenant : Ultraviolet ouvre le set suivi par des titres moins connus, puis vous enchainez tous les tubes. Pourquoi ne pas mélanger davantage ?

Matt : Ah, ils n’ont pas aimé ?! (rire) En fait je crois que c’est la même set list que pour nos concerts en Angleterre. Quand on a choisi cet enchaînement, on pensait à nos spectateurs anglais et à nos singles de l’époque. On voulait faire plaisir à tout le monde. Et comme on est fainéant on n’a pas changé la set list pour notre tournée européenne… Mais je ne suis pas sûr que la set list devrait beaucoup évoluer. Je pense que c’est un set bien équilibré.

Chris : Je crois qu’on l’a plutôt bien ficelée. On commence avec Ultraviolet et Stay with me, 2 singles, puis au milieu des morceaux moins connus et à la fin on s’éclate ! C’est fun pour nous alors j’espère que pour le public aussi ! C’est encore une question d’énergie, comme on disait tout à l’heure. Si ça marche pour nous, on espère que ça marche pour le public. Mais peut-être pas finalement…

 

 

Vous finissez bientôt tout juste votre tournée européenne, une envie de vous exporter mondialement peut-être ? Comment aborde-t-on une tournée en dehors de l’Angleterre où vous remplissez les salles ?

Matt : Oui c’est vrai, il y a plus de monde pour nos concerts en Angleterre. Mais c’est normal on y joue depuis plus longtemps.

Chris : Oui quand on vient dans d’autres pays, on doit tout recommencer du début.

Matt : C’est ça, on repart de rien. Comme aux Etats Unis et au Japon où nous sommes allés récemment. On doit recommencer à nouveau mais c’est plutôt excitant ! On veut partir à l’aventure et découvrir le monde, essayer de nouvelles choses. Alors pour nous c’est super d’aller dans d’autres pays et de jouer à Paris notamment. Quand on vient d’une ville comme Reading, il ne se passe rien. Alors on rêve de venir dans des endroits comme Paris, Los Angeles ou Tokyo parce que c’est marrant et, en plus, on est payés pour le faire. C’est incroyable !

Le titre Palace qui clôt l’album est très différente des autres, c’est une genre de balade à la Kodaline. Est-ce un ballon d’essai ou ce morceau représente-t-il quelque chose de spécial pour vous ?

Matt : Les deux en fait. C’est une chanson qui représente beaucoup pour moi, je l’ai écrite quand j’étais plus jeune. J’avais 19 ans, je sortais, je rencontrais des gens… On a essayé de la rendre plus rock avec le groupe mais on n’arrêtait pas de revenir à cette démo où je la jouais au piano. Alors parfois il faut écouter une chanson et la laisser nous guider. On a fait ce qui nous semblait le plus juste pour cette chanson. Et puis on avait besoin de quelque chose pour diversifier un peu l’album. Les gens disent que cette chanson se distingue. Et on est d’accord car c’est ce que nous voulions faire ! On voulait montrer qu’on savait faire autre chose qu’enchaîner des riffs et ce genre de choses. Alors peut être que dans le prochain album, on verra une dynamique différente dans nos arrangements.

Sur la version Deluxe de l’album, il y a six titres de l’album réinterprétés en acoustique. Pourquoi ces bonus ? Vous aimeriez faire une tournée acoustique par la suite ?

Matt : Ahah c’est une bonne question ! On l’a plus ou moins déjà fait. Quand on a sorti l’album, on a fait une tournée dans des magasins de musique en Angleterre. Et on y a joué en acoustique. C’était plutôt cool. Pour la version Deluxe, on n’avait pas très envie de partager des morceaux enregistrés en live. On voulait montrer une autre facette de nos morceaux. Tous nos chansons débutent avec une guitare acoustique et du piano alors on voulait montrer ce côté-là du groupe. Ça donne une image plus complète du groupe qui ne fait pas de la musique d’une seule manière. Et il n’y a pas beaucoup de groupes qui font des versions acoustiques de leurs morceaux. Alors on a eu envie de le faire parce qu’on aurait très envie d’entendre les morceaux de nos groupes préférés en version acoustique. C’est plutôt cool. Donc je ne vois pas pourquoi on le ferait pas pour l’album suivant. Et puis c’est fun ! Et c’est aussi une manière de reconnaître qu’on est en 2017 et de laisser la musique s’exprimer. Parce qu’aujourd’hui, les gens ont tendance à tout consommer très rapidement…

En février dernier vous avez jouez au festival Génériq à Sochaux, dans les loges du stade de foot. Quel souvenir en avez-vous ?

Matt : On s’en souvient très bien. C’était vraiment super !

Chris : C’était tellement différent de jouer là-bas plutôt que sur une scène normale !

Matt : On a même pu taper dans le ballon. Et puis on a eu des écharpes.

Chris : Et des maillots de foot !

Le foot c’est une passion pour vous, comme pour beaucoup d’anglais ?

Matt : Oui on aime le foot. Je supporte l’équipe de Reading (Reading FC). Et puis je suis la Premier League. On n’est pas dingue de foot mais on aime bien ça. Je n’avais jamais entendu parler de Sochaux avant, alors c’était intéressant. On a adoré y jouer. On aime faire des choses différentes, hors du commun.

Chris : C’était vraiment étrange. On se souviendra toujours de ce concert parce que ça sortait de l’ordinaire.

Ces temps-ci, certains groupes sortent un premier album remarqué mais pour le deuxième, ils tombent dans l’excès en voulant trop en faire, au détriment de l’originalité. Je pense notamment à Catfish and the Bottlemen qui ont perdu leurs âmes. Etes-vous conscients de ce risque ? Avez-vous peur d’une panne d’inspiration entre le premier et second album qui vous pousserait à tomber dans la facilité ?  

Chris : On essaie de ne pas trop s’en inquiéter…

Matt : On a écrit notre premier album pendant 4 ans. On ne savait même pas qu’on était en train d’écrire un album. Ça a été 4 années pendant lesquelles on a écrit des chansons soit dans des studios de répétitions, en nous demandant ce qu’on allait jouer, soit pendant des petits concerts, le week-end dans des bars locaux. Alors c’était plutôt pur et notre processus d’écriture est assez naturel. Au final ce sont les meilleures chansons qui ont survécu à ces quatre années. Si on continue à jouer certains morceaux après 2 ou 3 ans c’est qu’ils ont survécus. Maintenant c’est différent, on écrit un album en pleine tournée. On n’avait jamais fait ça avant. On essaie d’écrire un album en deux fois moins de temps que pour le premier. On a eu du succès avec ce premier album, on a fait des choses incroyables mais ça ne change pas la manière dont on écrit. On a peut-être un peu grandi, notre groupe a pris une autre stature mais ça ne veut pas dire que d’un coup on se met à écrire beaucoup plus rapidement. Notre processus de création n’a pas vraiment changé. J’imagine que si certains groupes produisent des seconds albums moins bons que les premiers c’est parce qu’ils sont sous pression. Et avant ce deuxième album, les groupes n’ont jamais été sous pression. Alors c’est quelque chose de nouveau. J’imagine que les meilleurs groupes arrivent à surpasser ce stress et arrivent même à s’éclater, sans avoir d’inquiétudes. Alors ceux qui n’y arrivent pas, cèdent au stress. Mais je pense que c’est un phénomène nouveau. Parce que maintenant les groupes doivent vraiment se développer avant de signer pour un album. Je crois vraiment qu’il faut avoir bien avancé dans son projet avant de pouvoir signer avec une maison de disque. Alors qu’un groupe comme T-Rex, par exemple, sortait des albums assez rapidement. Au départ, ils s’appelaient Tyrannosaurus Rex, ils ont sorti 2-3 albums que personne n’a jamais écouté avant de devenir définitivement T-rex et de sortir des albums sous ce nom-là. Alors il n’y a pas eu ce phénomène où ils ont sorti un très bon premier album et les gens se demandent si le second sera aussi bon car ils avaient déjà 3 albums à leur actif avant de connaître le succès. C’est vraiment une culture totalement différente. Finalement, on part en tournée environ 18 mois pour défendre un album qu’on joue déjà plus au moins depuis 2 ans. Mais ça va être super !

Chris : En tout cas on est très excité par ce nouvel album.

Matt : Oui tout à fait ! Et c’est pour ça que je ne veux pas que notre groupe se mette trop la pression.

 

 

Le groupe anglais Inheaven a un peu le même parcours que vous depuis 2015, vous les connaissez ?

Matt : Ah oui bien sûr, on les connait bien. On a fait pas mal de concerts ensemble. Ce sont de supers potes ! On aime beaucoup ce qu’ils font !

Une tournée des festivals est-elle prévue en dehors du Royaume-Uni ? En France notamment ?

Matt : On adorerait jouer à Rock-en-Seine ! Mais je ne sais pas si c’est prévu pour le moment… Mais j’espère qu’on fera des festivals en France. On va annoncer quelques dates de festival en Angleterre mais j’espère qu’on pourra revenir en France.

Est-ce que vous avez prévu jouer à nouveau au festival de Reading ? Est-ce que c’est une sensation différente de jouer dans la ville où est née The Amazons ?

Matt : Maintenant qu’on a passé beaucoup de temps loin de Reading, c’est sympa d’y retourner. Peut-être qu’on retournera au Reading Festival, je ne sais pas. On verra. On aimerait beaucoup en tout cas.

Qu’est-ce qu’on écoute comme musique en ce moment chez the Amazons ?

Matt : Mhh, qu’est-ce que j’écoute en ce moment… Je vais sortir mon téléphone c’est plus simple !

Chris : J’écoute souvent le groupe Mini Mansion. Leur dernier album « The Great Pretenders » est très bon. Et puis j’écoute beaucoup de Led Zeppelin pour m’occuper. En particulier « Mothership » compilé par Jimmy Page et remasterisé.

Matt : Moi j’écoute T-Rex, Led Zeppelin, Lana Del Rey, Pink Floyd, ACDC. Malcolm Young Rest In Peace ! Le nouvel album d’Alt-J « Relaxer » est excellent aussi ! Quoi d’autre ?…  London Grammar, The War on Drugs, Royal Blood, Queen of the Stone Age. Leur nouvel album est très bon ! Et voilà je crois…

Que pensez-vous de la scène britannique en ce moment ?

Matt : Plutôt bonne. La scène britannique est meilleure que la plupart des autres pays. Mais on n’est pas très objectif. On est anglais alors on aime la musique anglaise. Artic Monkeys c’est super ! Les Royal Blood sont vraiment cools. Ils jouent sur de grandes scènes partout en Europe. Ils sont vraiment bons. A Tokyo on a joué avec de supers groupes. Des petits groupes émergents comme Yonaka, ils sont très bons. Pale White aussi…

Chris : Declan McKenna, un irlandais.

Matt : Oui, Declan Mckenna est cool. Au Royaume Uni, il y a toujours tellement de groupes ! Chaque année, il y a au moins 5 groupes qui émergent. Et ils sont tous très bons. Alors ça sera intéressant de voir qui survit et qui ne survit pas… Les paris sont lancés !

 

-Séverine

 

 

Crédits photos : Merci à Lisa Chappot – 

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